Humiliation, violence physique et verbale, manque de contenance, parent continuellement préoccupé et absent psychiquement, environnement anxiogène, ambiance incestueuse, inceste…
Autant de situations à l’origine de stress aigus. Face à la répétition des traumatismes, un état de “stress chronique” peut se déclencher et altérer le fonctionnement psychologique et biologique de l’enfant (hyperactivité, troubles de l’apprentissage, isolement, comportement violent, impulsivité, incapacité à réguler ses émotions…)
Le stress généré par la violence abîme profondément durant ces périodes là. D’autant, que l’enfant et l’adolescent sont en construction sur le plan neurologique et physiologique. Les digues psychiques ne sont pas encore bien érigées.
“La maltraitance physique est généralement accompagnée de maltraitance psychologique, mais l’inverse n’est pas nécessairement vrai”
La maltraitance ne se résume pas à des bleus sur le corps. Elle peut être invisible, silencieuse et pour autant générer des troubles importants. Privés d’amour ou d’attention, ignorés, isolés, considérés comme des adultes avec des responsabilités complètement inadaptées à leur âge, insécurisés et n’ayant pas la capacité de se réconforter seuls, l’enfant et l’adolescent souffrent aussi. Sans cri et sans coup, la maltraitance est pourtant belle et bien présente. Tout autant destructrice que la maltraitance physique. La maltraitance psychologique est un véritable poison.
Le psychologue, Jérôme Guay, nous dit : « Le véritable trauma, sous-jacent à la maltraitance et à la négligence, c’est le fait d’avoir été abandonné, de ne pas avoir été protégé, de ne pas avoir été important, de ne pas avoir compté,. On peut souvent constater que les troubles anxieux ou les réactions dépressives ont comme fondement la peur de l’abandon» .
LES REPERCUTIONS
Lorsque les blessures physiques et psychologiques sont infligées par ceux qui sont censés aimer et protéger l’enfant ou l’adolescent les risques sont aggravés.
Les conséquences d’une enfance maltraitée, négligée sont variées, la liste ci dessous reprend les conséquences les plus fréquentes. Elle n’est pas exhaustive puisque chaque être humain et chaque histoire sont uniques (certains éléments sont extraits du site ; http://www.maltraitance-stresschronique.info/info.html).
* Une humeur de tendance dépressive sur fond de tristesse avec attitude plutôt taciturne et réservée, parfois effacée. La personne peut être résignée face aux difficultés de la vie, cherchant même parfois à les provoquer sans s’en rendre compte, notamment dans la vie de couple ou familiale.
*Une fatigue persistante même en dehors des périodes dépressives. Un besoin important de repos qui n’est pas forcément lié à la pratique d’une activité physique.
*Un manque d’organisation important parfois même perçu par la personne comme handicapant. Des pertes de mémoire récurrentes, une sensation de brouillard qui l’empêche d’y voir clair et de pouvoir analyser les situations correctement.
* Une angoisse diffuse généralisée de type existentiel avec préoccupations ou inquietudes sur tout, s’attendant à ce qu’un évènement tragique vienne lui barrer la route, voyant toujours le pire à sa porte. On dit de cette personne qu’elle est « une grande anxieuse, une grande angoissée » (Cette angoisse est NORMALE, il n’y a pas de culpabilité à avoir)
* Doute, y compris quand il y a réussite socio-professionnelle (tendance à se dénigrer) et manque de confiance en autrui malgré un entourage stable et sécurisant. Cette angoisse est principalement observable dans la relation de couple, d’où le besoin d’être toujours réconforté, rassuré tant sur soi que sur l’amour et l’affection que porte le conjoint.
* Une tendance (plus ou moins marquée) à tester les limites en couple pour voir si celui ou celle qui partage sa vie, l’aime réellement et compte vraiment rester avec il/elle quoi qu’il arrive. Chez certaines personnes dites abandonniques, cette tendance se traduit par un phénomène de “yoyo”, qui consiste à quitter, revenir, quitter, revenir… pour “voir” ce qu’il se passe. Ils testent inconsciemment l’amour inconditionnel dont ils ont manqué. On parle aussi de “phénomène de répétition”, qui consiste à rejouer de façon inconsciente les abandons passés toujours douloureux.
*Difficultés à vivre en couple, peur, parfois refus de l’intimité, besoin viscéral de solitude. Sentiment d’être incompris, nécessité de se tenir éloignés des autres ou en contact mais sur une durée modérée.
*Pleurs, tristesse, sentiment de vide et de futur impossible, perte d’espoir.
*Image détériorée de soi même, trouble de l’identité, trouble de perception de la réalité.
*Tendance à l’autodestruction, intolérance à la frustration ou au stress, instabilité personnelle et/ou professionnelle (Certains comportements qui peuvent s’apparenter à une volonté de ne pas se contrôler, peuvent d’avantage relever d’une IMPOSSIBILITE d’auto-contrôle)
*Souffrances physiques d’origine psychosomatique : Douleurs gastriques, maux de tête, angoisse, oppression dans la poitrine, problèmes de peaux… . Certaines personnes ayant vécu des enfances douloureuses somatisent et “cherchent” la source de leurs maux en multipliant les examens médicaux. Bien sûr, que dans certains cas il y a une maladie organique diagnostiquée mais pour les fois où ça ne l’est pas, il est intéressant d’aborder le passé du patient. Selon l’institut de victimologie français “toutes les formes de maltraitances, récentes et/ou anciennes devraient être systématiquement recherchées dans tout bilan clinique.”
En effet, les maladies psychosomatiques sont souvent sous diagnostiquées du fait de la méconnaissance et du manque de formation du corps médical sur ce sujet.
L’étude américaine de Felitti (2010), montre que le principal déterminant de la santé d’une personne à 55 ans est d’avoir subi ou non des violences dans l’enfance.
“Les conséquences sur la santé, sont à l’aune des violences subies. Plus elles ont été graves, fréquentes et plus les conséquences sur la santé sont importantes : risques de mort précoces par accidents, maladies et suicides, de maladies cardio-vasculaires et respiratoires, de diabète, d’obésité, épilepsie, de troubles psychiques, d’addictions, de douleurs chroniques invalidantes, etc…” (source : https://www.memoiretraumatique.org/violences/violences-faites-aux-enfants.html?PHPSESSID=7m6m8vqd6o8sbhr0absins2vf7)
La sagesse populaire veut que le temps guérisse les plaies
Les répercussions de la maltraitance sont nombreuses, durables et même si quelques individus arrivent à s’en accommoder, la majorité se débattent avec leur souffrance avec une impression de survivre. Le souci majeur avec les traumatismes infantiles (traumatismes complexes) c’est qu’ils sont profondément ancrés dans la mémoire non verbale des patients, ils se sont entremêlés à la structure de la personne, des mécanismes s’y sont automatisés et restent figés malgré le temps qui passe.
LA PRISE EN CHARGE
La souffrance d’origine traumatique doit faire l’objet d’une prise en charge psycho-corporelle.
Pourquoi ? Parce que face à la violence et au non -sens, le cerveau isole les affects de la mémoire consciente, en déconnectant plusieurs parties du cerveau entre elles. Il divise l’évènement traumatisant et le stocke à différents endroits de la mémoire en quelque sorte. Par ce procédé, il protège la personne des effets délétères de tensions trop intenses (Stress et autres hormones).
Face à ces puissants mécanismes d’isolation, il est difficile d’entrer en contact avec la mémoire des émotions par le biais d’un simple raisonnement conscient. D’autant que les souvenirs traumatiques sont aussi (surtout ?) stockés sous forme de mémoire somatique (sensations corporelles).
En stimulant le corps et l’esprit simultanément, la reprise de contact s’effectue, la “digestion” puis l’intégration des évènements douloureux est possible.
Ci dessous le lien vers un vidéo très intéressante de Bessel Van Der Kolk, spécialiste mondial du trauma et de la maltraitance https://www.youtube.com/watch?time_continue=467&v=4xRilY9chIY